Un ménage à trois en Asie

Afin d’obtenir confirmation de son rendez-vous avec Kim du 12 juin prochain, Trump a fait les yeux doux à Xi. Il se mène dans les alcôves du pouvoir une étrange partie à trois.

Pour y parvenir, le président américain décerne à son homologue chinois le titre de « joueur de poker mondial » et lui accorde un « accord cadre » dont on ne sait pas grand-chose, qui n’aura demandé que deux sessions de négociations à Pékin et à Washington pour être conclu, à la différence des autres qui traînent.

Les questions fusent de partout. Est-il vraisemblable que les autorités chinoises puissent augmenter leurs achats agricoles américains de 200 milliards de dollars ? Que « l’accord cadre » s’en tienne à la réduction du déficit commercial et taise d’autres revendications américaines essentielles comme les pratiques commerciales jugées déloyales de Pékin en raison du « transfert forcé de technologies » et du « vol de la propriété intellectuelle » des entreprises américaines ? Que cache donc l’emphase des termes employés pour cet accord, dont « les détails viendront plus tard » selon Larry Kudlow, le principal conseiller économique de la Maison Blanche ?

Donald Trump s’est beaucoup avancé et a besoin d’un succès en Corée du Nord. Et il compte sur le président chinois pour cela. Mais son jeu n’est pas tout en finesse, et il a affaire à des partenaires chevronnés formés aux jeux et enjeux cruels du pouvoir. Le résultat n’est pas au rendez-vous. La rencontre au sommet avec Kim pourrait être reculée et il n’est parvenu avec la Chine qu’à ce qui s’apparente être une trêve dans le cadre de la guerre commerciale qu’il a lancé.

L’épisode de ZTE, le groupe chinois de télécom, n’est guère plus brillant. Les deux présidents avaient convenu d’en faire un cas à part, à la demande de Xi, mais il a fallu ajuster le tir. Interdire pendant sept ans la fourniture à ZTE de composants américains indispensables à la production de ses smartphones n’avait pas seulement pour conséquence la cessation d’une partie importante de l’activité de l’entreprise ; ses fournisseurs américains étaient une nouvelle fois pénalisés, et cela lui était reproché.

Donald Trump parle désormais d’une nouvelle amende de plus d’un milliard de dollars et de l’obligation pour l’entreprise de changer ses cadres de direction, en raison de la violation des règles d’embargo américaines. ZTE s’en remettra, les grands projets de développement technologique du président chinois ne seront pas brutalement interrompus.

2 réponses sur “Un ménage à trois en Asie”

  1. En un sens, c’est bien joué du point de vue américain : l’annulation est annoncée quelques heures après la destruction par Pyongyang de son site d’essais nucléaires. Il y a fort à parier qu’à Washington, on se paie une pinte de bon sang.

    Il est possible que le dictateur nord-coréen aie la très légère impression d’avoir été mené en bateau depuis le début.

    D’un certain point de vue, ne plus avoir de site d’essais est embêtant. De l’autre, et sans reconstruire un nouveau site – ce qui serait coûteux et long – il dispose d’une solution fort simple : réaliser un test « de bout en bout » comme ça s’est déjà fait dans les années 60/70.

    Un champignon H dans le Pacifique sud aurait l’avantage d’être une réponse claire à l’humiliation cuisante qu’il vient de subir, tout en ôtant les derniers doutes de ceux qui font encore semblant de croire que son pays n’est pas une puissance nucléaire. Et pour peu que la bombe soit tirée par un missile de portée suffisante, plus important encore cela ferait disparaître les derniers fantasmes de ceux qui imaginent une guerre préventive où seuls les alliés locaux Corée du Sud et Japon seraient frappés, pas l’Amérique. Voir ce qu’a pu dire un sénateur Lindsey Graham par exemple.

    Je verrais bien un tel essai avant la fin de l’année. Et autant être franc : à mon sens c’est le plus souhaitable, car au moins l’équilibre de la terreur serait définitivement établi.

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